« Guère plus d’une semaine après le concert en demi-teinte de Squeeze, me voici de retour dans cette salle du Palace que j’aime décidément de plus en plus. Et cette fois, nous sommes là pour voir la première apparition à paris d’un groupe qui défraye la chronique (d’où une salle bien remplie cette fois) : le Gun Club ! Comme a dit un critique inspiré : « Voici une musique qui arrête les conversations ! ». Belle description pour illustrer l’intensité radicale qui se dégage de ce « punk blues » à la fois fidèle à l’esprit ancestral du blues et totalement possédé par une rage bien actuelle.

En première partie, je suis heureux d’avoir aussi l’occasion de découvrir La Souris Déglinguée, un combo qui fait également pas mal parler de lui du fait de sa radicalisation et de son agressivité. J’ai d’ailleurs bien aimé leur premier maxi, Une Cause à Rallier, plein de hargne punk et assez original. Las ! Les mecs qui montent sur scène sont de bien piètres musiciens, ce qui est "punk " oui, je sais… mais n’ont visiblement rien à nous offrir tant ils ont l’air dépassés par l’idée même de jouer devant un public (le set s’apparentera plus à une répétition sur scène qu’autre chose…). De plus, ils sont menés par un Tai-Luc arrogant et stupidement désagréable : on a entendu dire que le pôvre fait actuellement son service militaire, et on comprend qu’il doit en baver, mais le fait d’avoir juste réussi à s’évader de sa caserne pour retrouver son groupe n’excuse guère le mépris dont il témoignera envers son public (nous !), et, pire encore, ses propos insultants vis-à-vis du Gun Club, qui ne me semble pourtant pas faire partie des ennemis de classe…  Etre punk n’excuse pas la bêtise, au contraire même. Tirons la chasse sur cette grosse déception.

Quand Jeffrey Lee Pierce, le leader de The Gun Club, entre en scène, on est pour le moins frappés par son allure, paradoxalement à la fois répugnante et charismatique. Le line up du groupe n’est plus le même que sur

le premier album, ce qui nous vaut le plaisir de contempler une bassiste sculpturale et magnétique (j’apprendrai ensuite qu’elle se nomme Patricia Morrison), au look d’égérie goth, quand même un peu décalé par rapport au blues "traditionnel" du groupe. Rampant, bavant, halluciné, sous l’emprise de je ne sais quelles substances, Jeffrey Lee Pierce, malgré son image  "Marlon Brando meets Debbie Harry" semble se prendre pour la réincarnation de Jim Morrison, et sacrifie rapidement la violence et la force de ses chansons en les dissolvant dans de longues incantations (psychédéliques ? babas ?) et des rituels vaudous. Il est indéniable que le spectacle de la folie (ou la folie comme spectacle, au choix) reste excitant, et la fascination que Jeffrey Lee Pierce exerce est incontestable. Mais je trouve quant à moi que l’esprit "punk" requiert plus de rigueur et de concision, d’où une légère déception ce soir. Bon, ceci dit, Sex Beat ou For The Love of Ivy sont des tueries hallucinantes, et justifient pleinement la ferveur que ce "jeune groupe" provoque à Paris !

 The Gun Club a le potentiel d’un grand groupe noir et malade, si seulement Pierce le veut bien. En tous cas, on continuera à suivre de très près la carrière discographique et scénique de ce sombre OVNI. »

Les photos de la soirée sont de Patrick M.

Les musiciens de The Gun Club :

Jeffrey Lee Pierce (vocals)

Ward Dotson (guitar)

Patricia Morrison (bass)

Terry Graham (drums)

La setlist (incomplète) du concert de The Gun Club :

Like Calling Up Thunder (new song)

Sleeping In Blood Red City (new song)

Fire Of Love (Jody Reynolds cover)

Goodbye Johnny (Fire of Love – 1981)

Preaching the Blues (Robert Johnson cover) (Fire of Love – 1981)

Cool Drink Of Water (Fire of Love – 1981)

Devil In the Woods (new song)

Sex Beat (Fire of Love – 1981)

For the Love of Ivy (Fire of Love – 1981)

Black Train (Fire of Love – 1981)

Keep On Knockin'